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22 avril 2021

Méthodes de simulations: leur brevetabilité enfin confirmée !

La Grande Chambre de recours de l’office européen des brevets a rendu, le 10 mars 2021, une décision (décision G1 /19) qui apporte des réponses à la question de la brevetabilité des méthodes de simulation.

Pour rappeler le contexte, la demande de brevet européen 03793825.5 concernant la modélisation et la simulation des mouvements d’une foule de piétons dans un bâtiment avait été rejetée par la division d’examen pour défaut d’activité inventive. En effet, celle-ci avait alors considéré que le caractère technique de la méthode de simulation revendiquée n’était lié qu’à l’utilisation d’un ordinateur conventionnel et qu’elle ne pouvait, de ce fait, pas être considérée comme inventive. La demanderesse a fait appel de cette décision et les questions suivantes ont été soulevées :

  1. Dans le cadre de l’évaluation de l’activité inventive, une simulation mise en œuvre par ordinateur d’un système ou d’un processus technique peut-elle résoudre un problème technique en produisant un effet technique qui va au-delà de la mise en œuvre de la simulation sur un ordinateur si la simulation mise en œuvre par ordinateur est revendiquée comme telle ?
  2. [2B] En particulier, est-ce une condition suffisante que la simulation soit basée, au moins en partie, sur des principes techniques sous-jacents au système ou au processus simulé?
  3. Quelles sont les réponses aux première et deuxième questions si la simulation mise en œuvre par un ordinateur est revendiquée comme faisant partie d’un processus de conception, en particulier pour vérifier une conception ?

A cette première question, la Grande Chambre de recours répond par l’affirmative. En effet, selon elle, aucun groupe d’inventions mises en œuvre par ordinateur ne peut être a priori exclu de la protection par brevet. Les simulations sont à considérer de la même manière que toutes les autres inventions mises en œuvre par ordinateur, c’est-à-dire en suivant l’approche COMVIK (T641/00). Il faut donc évaluer si les caractéristiques revendiquées contribuent au caractère technique d’une invention, tout effet technique « supplémentaire » (c’est-à-dire allant au-delà des interactions électriques normales au sein d’un ordinateur) pouvant être pris en compte pour l’évaluation de l’activité inventive. Il est important de noter également que les données d’entrées et de sorties d’une méthode de simulation ne doivent pas être nécessairement reliées à une réalité physique, des effets techniques pouvant également se produire dans l’ordinateur (par exemple par des adaptations spécifiques d’un ordinateur).

La Grande Chambre de recours répond par ailleurs négativement à la deuxième question soulevée : le fait qu’une méthode de simulation soit fondée, en tout ou partie, sur un système ou un processus technique n’est ni une condition nécessaire, ni une condition suffisante, pour qu’une telle méthode contribue au caractère technique d’une invention.

Enfin, en réponse à la troisième question, la Grande Chambre affirme qu’il n’y a pas de raison d’adopter une analyse différente dans le cas où la méthode de simulation fait partie d’un processus de conception. En effet, « processus de conception » désigne en particulier un processus de vérification de la conception, et bien que ce type de processus semble être de l’ordre de l’activité intellectuelle, l’approche COMVIK montre qu’en fonction du contexte technique, les caractéristiques de conception peuvent ou non contribuer au caractère technique de l’invention.

En conclusion, cette décision montre que les méthodes de simulations mises en œuvre par ordinateur ne sont pas exclues de la brevetabilité à condition que l’invention revendiquée comporte des caractéristiques techniques. Ces nouveaux éléments apportés par la Grande Chambre de recours de l’OEB valident l’approche qui était jusqu’ à lors utilisée pour les brevets concernant des inventions mises en œuvre par ordinateur et confirment que les méthodes de simulations ne sont pas à traiter différemment des autres inventions de même nature.

Amina GIRIN-AFROUNN